Depuis ses débuts, EVE se définit comme un projet expérimental et s’épanouit dans la réflexion, le questionnement et les ajustements en temps réel de son équipe interdisciplinaire. Pionnier au sein de l’école d’une pédagogie articulant pratique du chant choral, technique Alexander et rythmique Dalcroze, il se montre par nature aussi attentif aux savoirs qu’au corps et aux émotions, à l’exigence artistique qu’à la complexité des jeunes en construction, à l’équilibre individuel et au bien vivre ensemble.

Après plusieurs phases riches d’enseignement, conduites en direction des écoliers puis des collégiens grâce à l’étroit partenariat du département Éducation de la Philharmonie avec l’Éducation nationale, EVE voit aujourd’hui ses contours redessinés et sa géographie élargie : conforté dans sa volonté de transfert de compétences, d’essaimage et d’intergénérationalité, il se déploie désormais largement hors d’Île-de-France via le réseau des cités éducatives afin d’accompagner les acteurs territoriaux du chant choral. 

Les adolescents, moteur d’une dynamique du chant choral

Les fondamentaux restent identiques : EVE s’ancre dans le temps scolaire afin de favoriser l’accès des jeunes au chant choral, d’éveiller le bien-être par l’intermédiaire du chant et d’en capter les bienfaits dans les autres apprentissages – dans la vie. Une pédagogie psychocorporelle, dont les adolescents restent les destinataires de prédilection. « Notre expérience et les études scientifiques qui ont accompagné nos premières années nous ont confirmé combien le chant choral était un moyen privilégié pour travailler les problématiques adolescentes, souligne Fabien Lerat, nommé responsable du projet par la nouvelle directrice du département Éducation arrivée en juin 2024, Anne-Sophie Barthez. Dans ce nouvel EVE, les collégiens sont amenés à être le moteur d’une véritable dynamique territoriale de la pratique du chant choral. »

Le changement d’échelle est le nouvel indice de reconfiguration du projet. Alors que Paris et l’Île-de-France étaient fortement représentés les années passées, EVE rééquilibre sa présence en région pour mieux partager son action. Partenaire des cités éducatives, la Philharmonie intègre la politique développée pour les quartiers prioritaires par l’Agence nationale de cohésion des territoires (Anct) et la direction générale de l’Enseignement scolaire (Dgesco). Les cités éducatives ont pour mission de mutualiser les ressources entre services de l’État, collectivités territoriales et Éducation nationale sur un même territoire et de réduire des inégalités par l’encouragement, dans le cadre scolaire, de projets transversaux culturels, sportifs ou citoyens. Un immense réseau, l’école au centre.

Un rayonnement sur toute la France

Le projet EVE, à forte valeur artistique et sociale, y a trouvé assez naturellement sa place. « Cette saison, précise Fabien Lerat, nous sommes présents dans dix cités éducatives, treize collèges et sept régions, selon un rayonnement cohérent entre nord et sud : Île-de-France, Normandie, Hauts-de-France, Grand Est, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Nouvelle Aquitaine et Auvergne-Rhône-Alpes. Les cités éducatives peuvent ainsi renforcer leur action en faveur du développement du chant choral. »

Des partenariats sont également noués avec des structures déjà très actives dans le domaine choral comme le Centre d’art vocal/Musicatreize à Marseille et l’INECC Mission Voix Lorraine, centre de ressources pour les pratiques chorales et vocales.

Trois chœurs, des enfants de CM2 aux adultes

Tout est question de dynamique, au cœur du projet comme au sein des territoires. EVE s’affiche résolument comme un projet à tiroirs : point de départ, un chœur d’adolescents travaillant, au collège de sa cité éducative, avec un professeur de musique formé à la pédagogie EVE, un répertoire commun à tous les chœurs adolescents choisi par l’équipe EVE de la Philharmonie. Sur l’année, ce groupe de collégiens est accueilli pour deux temps forts à la Philharmonie – un grand rassemblement et une résidence –, pour trois autres sur son territoire. Le chœur est également épaulé par la chorégraphe hollandaise Panda van Proosdij, créatrice de la pédagogie choireography, chargée de la mise en scène du concert du 13 juin 2026.

Les adolescents sont également le noyau dur d’un chœur plus large, constitué hors les murs de l’établissement scolaire, réunissant autour de lui des élèves de classes de CM2 – associés au projet dans la perspective d’être les collégiens qui constitueront le chœur d’adolescents de l’année suivante – et des choristes adultes. Tous ensemble, sous la direction d’un acteur de territoire binôme du professeur de collège, ils forment un Chœur Cité EVE représentatif de leur cité éducative, intergénérationnel, diversifié. Il s’approprie librement les ressources et les répertoires proposés par la Philharmonie.

Ces deux chœurs coexistent avec le Chœur d’adultes professionnels EVE, fondé en 2022, riche aujourd’hui d’une cinquantaine de choristes formés à la pédagogie EVE et relais dans leur profession, issus majoritairement de Paris mais représentant également cette année sept régions de France. Ce troisième groupe rejoindra le Chœur d’adolescents EVE pour le grand concert de juin 2026. 

Au total, ce sont environ quatre cents collégiens de France concernés et mille cinq cents personnes impliquées dans les actions territoriales.

La Philharmonie, créatrice de synergies

Si le département Éducation de la Philharmonie et son équipe d’intervenants encourage, fédère et donne l’impulsion, il laisse chaque territoire gérer ses chœurs en autonomie, diversité des cités éducatives oblige : chacune des deux cent cinquante recensées en France a son profil, ses besoins, ses partenaires. La Philharmonie apporte ses ressources – la formation, les répertoires, les temps forts… – et favorise la transmission auprès de celles et ceux qui, sur le terrain, sont amenés à construire et à développer les projets locaux.

Avec cet EVE nouvelle génération, la Philharmonie se positionne pleinement dans son rôle d’établissement national – et plus seulement parisien : « Notre rôle, conclut Fabien Lerat, est de proposer la pratique psychocorporelle comme un outil que chacun peut s’approprier, se faire support de la pratique du chant choral, épauler et travailler main dans la main avec les acteurs locaux, créer des synergies. » Donner cette impulsion durable en région s’accorde parfaitement avec la mission de la Philharmonie de contribuer à revaloriser la filière du chant choral autant qu’à sa vocation d’établissement public favorisant l’accès à la musique au plus grand nombre : professionnels et amateurs, enfants, jeunes et adultes.