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Les clés du classique #52 — Ma Mère l'Oye de Ravel

Publié le 30 January 2025 — par Charlotte Landru-Chandès

L’écriture de Ma Mère l’Oye est contemporaine de l’amitié entre Ravel et Misia Edwards, la future Misia Sert. Musicienne et protectrice des artistes, elle prend le jeune Ravel sous son aile lorsqu’il est refusé au prestigieux Prix de Rome pour la cinquième fois ...

La série Les Clés du classique vous fait découvrir les grandes œuvres du répertoire musical.

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Les extraits de la version piano à quatre mains de Ma Mère l'Oye sont interprétés par Michel Dalberto et Frank Braley. Concert enregistré à la Salle Pleyel le 12 mai 2007.

Retrouvez le concert sur Philharmonie à la demande.

Les extraits de la version orchestrale de Ma Mère l'Oye sont interprétés par l'Orchestre National de Lyon sous la direction de Xian Zhang. Concert enregistré à la Philharmonie de Paris le 4 octobre 2019

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Misia et Ravel deviennent ensuite très amis ; la jeune femme trouve sa musique révolutionnaire et fait tout pour la défendre et la mettre en lumière.

Ravel est aussi très proche de Cipa Godebski, le frère de Misia. C’est à Valvins, un village situé près de la forêt de Fontainebleau, où se trouve l’ancienne maison de Misia rachetée par son frère, que Ravel compose Ma Mère l’Oye, en 1908.

L’œuvre regroupe cinq pièces enfantines et comporte cinq mouvements : Pavane de la Belle au bois dormant ; Petit Poucet ; Laideronnette, Impératrice des Pagodes ; Les Entretiens de la Belle et de la Bête et Le Jardin féerique.

Ravel puise son inspiration chez Charles Perrault, Madame d’Aulnoy ou encore Madame Leprince de Beaumont.

L’œuvre est dédiée à Mimi et Jean, la nièce et le neveu de Misia, âgés respectivement de neuf et sept ans.

Mimi raconte qu’à Noël, Ravel leur apportait des « tas de jouets. Il avait le goût du merveilleux et de la féerie, et les inventions et les jouets si ingénieux des baraques des boulevards au moment du nouvel an l’amusaient autant que nous. Il aimait le rococo, le baroque et un certain mauvais goût l’enchantait ». 

Ma Mère l’Oye est créée au piano le 20 avril 1910 à la salle Gaveau à Paris, par deux fillettes, Jeanne Leleu et Geneviève Durony, dans le cadre de la nouvelle Société musicale indépendante. C’est cependant la version pour orchestre, créée deux ans plus tard, qui s’est particulièrement imposée. Ravel est connu pour ses orchestrations très réussies, notamment celles des Tableaux d'une exposition de Moussorgski ou de sa propre Rapsodie espagnole.

Pour garder une atmosphère douce et sensible, proche de l’univers de l’enfant, Ravel choisit un effectif réduit : des vents par deux, des cordes, des percussions discrètes, et surtout pas de trompette, de trombone, ni de tuba.

Ma Mère l’Oye débute donc par la Pavane de la Belle au bois dormant, qui évoque la princesse de Perrault sur une danse des temps passés. Les pièces ne racontent pas à proprement parler les récits dont elles s’inspirent, mais dégagent une ambiance propre à l’univers du conte.

Dans Laideronnette, Impératrice des Pagodes, qui s’inspire du Serpentin vert de Madame d’Aulnoy, Ravel s’en donne à cœur joie et utilise avec humour des procédés et effets pour évoquer une Asie de fantaisie : recours au pentatonisme (échelle musicale constituée de cinq notes différentes), mélange des timbres, emploi du xylophone et du célesta…

À l’inverse, Les Entretiens de la Belle et de la Bête sont la seule pièce à illustrer le conte de manière précise. Les deux personnages sont présentés à travers une clarinette chantante et un contrebasson dans le grave. S’ensuit un dialogue entre eux, avant la métamorphose de la Bête en prince, suggérée par un glissando à la harpe. Le thème de la Bête est alors présenté au violon, de manière lumineuse.

L’œuvre se referme en apothéose avec Le Jardin féerique.

À la demande du mécène Jacques Rouché pour son Théâtre des Arts, Ravel transformera ensuite sa pièce en ballet, lui ajoutant quelques pages : un prélude, la Danse du rouet et quatre interludes. Il modifiera aussi l’ordre des mouvements.

Ma Mère l’Oye n’est pas la seule œuvre de Ravel évoquant le monde de l’enfance. Quelques années plus tard, il écrira une fantaisie lyrique, L’Enfant et les Sortilèges, en collaboration avec Colette, qui sera créée à l’Opéra de Monte-Carlo en mars 1925.

Œuvre d’apprentissage, L’Enfant et les Sortilèges aborde un autre pan de l’enfance, avec ses expériences et ses cruautés.

 

 

Charlotte Landru-Chandès

Charlotte Landru-Chandès  collabore à France Musique, La Lettre du Musicien et Classica. Elle conçoit des podcasts pour l'Opéra national de Paris et la Philharmonie de Paris.

  • Un podcast de Charlotte Landru-Chandès
  • Réalisé par Taïssia Froidure
  • © Cité de la musique - Philharmonie de Paris