Philharmonie de Paris - Home Page

7 septembre 2012 : le solo aquatique de Marc Copland

Publié le 09 April 2021 — par Pascal Rozat

— Marc Copland solo - © DR

Le pianiste américain dévoile la palette impressionniste de « Dolphin Dance » de Herbie Hancock. 

— Marc Copland solo

En ce 7 septembre 2012, rien ne semblait devoir se jouer comme prévu. À l’affiche de Jazz à la Villette, une rencontre au sommet entre deux des plus grands pianistes de leur génération, Marc Copland et Bill Carrothers. Las ! La conjonction improbable d’une tempête, puis d’une panne informatique à l’aéroport empêchèrent le second de traverser l’Atlantique, laissant le premier seul aux commandes de son Steinway.

Comme à la recherche d’une direction à donner à ce solo impromptu, Marc Copland, dès son discours d’introduction, place le concert sous le haut patronage de Bill Evans. « Ces voicings (…), cette couleur si particulière au piano (…), voilà ce que je vais essayer de faire ce soir. » Un fil rouge qui le mènera naturellement à conclure sa prestation par deux compositions issues du Kind of Blue de Miles Davis, Blue in Green et, en rappel, All Blues. Au milieu du concert, pourtant, c’est à un autre monument du piano jazz qu’il va rendre hommage : Herbie Hancock. Une légère bifurcation plutôt qu’un grand écart, tant le natif de Chicago peut être considéré comme l’héritier direct du grand Bill.

 

 

Arrêtons-nous un instant sur l’introduction de ce « Dolphin Dance » : bien au-delà de l’énoncé de la seule composition, c’est tout l’imaginaire impressionniste de Maiden Voyage, concept-album autour du thème de la mer, qui semble ici convoqué. La tension induite par l’insistance du trille inaugural laisse d’abord présager un épisode houleux, qui s’apaise néanmoins à partir de 0’32, pour céder la place à un horizon plus dégagé, un climat modal serein où perce pourtant encore comme une pointe d’inquiétude.

À la première minute, il faut d’abord tendre l’oreille pour reconnaître le début du thème, au milieu des éclaboussures d’une harmonie aux mille reflets. Ce n’est qu’à 1’53 qu’il se révèle enfin avec évidence, dans sa joyeuse pirouette finale : le paysage marin est installé, les dauphins peuvent débuter leur danse éperdue de swing.

 

 

 

Pascal Rozat

Journaliste à Jazz Magazine, Pascal Rozat développe également des activités de programmateur ainsi que de producteur sur France Musique.

Photo © Jean-Baptiste Millot