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Les Clés du classique #18 - La Symphonie n° 7 « Leningrad »​ de Chostakovitch

Publié le 14 février 2022 — par Charlotte Landru-Chandès

Juin 1941, l'armée allemande franchit la frontière russe. L’Union soviétique entre en guerre. C’est dans un Leningrad en proie aux bombardements que Chostakovitch se lance avec ardeur dans l’écriture d’une nouvelle symphonie. 

La série Les Clés du classique nous fait découvrir les grandes œuvres du répertoire musical.

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Les extraits de la Symphonie n° 7 « Leningrad » de Dmitri Chostakovitch sont interprétés par l'Orchestre du Théâtre Mariinsky, sous la direction de Valery Gergiev. Ce concert a été enregistré à la Salle Pleyel le dimanche 16 février 2014.

Retrouvez l'intégralité du concert sur Philharmonie à la demande.


Dmitri Chostakovitch : la Symphonie n° 7 « Leningrad »​​​​​​​

Dans la ville, en pleine guerre, la vie musicale se poursuit tant bien que mal. Dmitri Chostakovitch est alors assistant musical dans un théâtre qui propose des spectacles dans les hôpitaux et pour les militaires. Il est ensuite mobilisé comme pompier, tout en poursuivant l’écriture de sa Septième Symphonie. «Je ne pouvais pas ne pas la composer, c’était la guerre, raconte le compositeur dans ses mémoires. Je devais être solidaire du peuple, je voulais créer l’image de notre pays dans le combat et la perpétuer en musique.»

En octobre, Chostakovitch est évacué de la ville, assiégée par l’armée allemande. Il a déjà écrit les trois premiers mouvements de sa symphonie. Dès la fin du mois de décembre, l'œuvre est achevée et créée début mars par l’Orchestre du Bolchoï, à Kouïbychev. Très vite, son succès dépasse les frontières: la création new-yorkaise en juillet 1942, sous la baguette d’Arturo Toscanini, est un triomphe. En une saison, soixante représentations sont données aux États-Unis!

Beaucoup ont considéré cette Septième Symphonie comme un acte de résistance contre l’invasion nazie. Très vite, Staline et les Soviétiques en font un instrument de propagande, l’un des symboles de la «Grande Guerre patriotique». Il faut dire que les sous-titres prévus par Chostakovitch pour chacun des quatre mouvements allaient dans ce sens: «La guerre», «Souvenirs», «Les grands espaces de ma patrie» et «La victoire». Mais il les supprima par la suite. Chostakovitch donne une autre vision des faits dans ses mémoires: «Je ne suis pas opposé à ce [qu’on l’appelle] Leningrad. Mais il n’y est pas question du siège de Leningrad. Il y est question du Leningrad que Staline a détruit. Et Hitler n’a plus eu qu’à l’achever.»

Dès le premier mouvement, le ton est donné. La symphonie s’ouvre par un thème énergique et vigoureux, sur un rythme de marche, en écho à l’invasion allemande. Le climat change progressivement, un roulement de tambour s’installe en fond, peu à peu des discordances interviennent, la musique s’assombrit, se teinte de couleurs funèbres.

À propos du deuxième mouvement, indiqué Moderato, Chostakovitch nous dit: «C’est un intermezzo lyrique, assez doux. Contrairement au premier mouvement, il n’a aucun programme. Il y a une pointe d’humour. […] On ne peut continuellement tenir l’auditoire en état de tension.» Un humour qui s'exprime surtout dans le premier thème, assez sarcastique, donné au violon.
Le mouvement suivant est un Adagio, un mouvement lent. Malgré une musique d’abord apaisée et chantante, le climat de guerre ressurgit progressivement, avec ses discordances. Selon André Lischke, «les forces en présence ne sont plus seulement celles de l’envahisseur: face à elles se dresse le peuple en lutte», mais peu à peu, la sérénité revient.

Le dernier mouvement, d’allure triomphale, évoque quant à lui la victoire prochaine, malgré quelques passages aux accents funèbres. La symphonie se termine dans la liesse générale.

Cette Septième Symphonie, la plus longue des symphonies de Chostakovitch, inaugure le cycle des symphonies de guerre. Viendront ensuite la Huitième, composée et créée en 1943, et la Neuvième, en 1945, deux mois après la victoire. Pour cette dernière, tout le monde s’attendait à une symphonie glorieuse, encore plus triomphale que ses aînées. Il n’en sera rien: la légèreté, la brièveté, et l’humour propres à l'œuvre feront scandale.

Charlotte Landru-Chandès

Charlotte Landru-Chandès  collabore à France Musique, La Lettre du Musicien et Classica. Elle conçoit des podcasts pour l'Opéra national de Paris et la Philharmonie de Paris.

Un podcast de Charlotte Landru-Chandès, réalisé par Taïssia Froidure. Une production Cité de la musique - Philharmonie de Paris.