La série Les Clés du classique nous fait découvrir les grandes œuvres du répertoire musical.
Écouter ce podcast sur Apple Podcasts, Deezer, Google Podcasts ou Spotify.
Les extraits de la Symphonie n° 3 de Johannes Brahms sont interprétés par la Staatskapelle Berlin, sous la direction de Daniel Barenboim. Ce concert a été enregistré à la Philharmonie de Paris, le dimanche 3 novembre 2019.
Retrouvez l'intégralité du concert sur Philharmonie à la demande.
Johannes Brahms : la Symphonie n° 3
En 1870, Johannes Brahms déclare qu’il ne composera jamais de symphonie. « Tu n’as pas la moindre idée de ce que c’est qu’entendre continuellement derrière soi les pas d’un géant ! » dit-il au chef d’orchestre Hermann Levi. Brahms fait référence à son aîné, Ludwig van Beethoven. Il rêve pourtant d’écrire une symphonie, mais pas facile de passer derrière ses prédécesseurs et leurs chefs-d'œuvre. Ce n’est donc que tardivement que Brahms se lance dans l’aventure symphonique.
Il a déjà la quarantaine quand il crée sa Première Symphonie, en 1876, après 20 ans de gestation (l’œuvre a été entreprise en 1852) ! Mais, à l’époque, le « géant » Beethoven impressionnait encore le jeune Brahms… Une fois l’épreuve de la Première Symphonie passée, Brahms enchaîne avec une Deuxième, créée en 1877. La troisième, elle, attendra un peu.
Été 1883, Brahms a maintenant 50 ans. Comme chaque année, il se retire loin de l’agitation de la ville. Mais cette fois-ci, il change ses habitudes. Ce n’est pas dans les Alpes autrichiennes qu’il va chercher le calme, mais du côté du Rhin. Il loue un logement dans la ville thermale de Wiesbaden, en Allemagne. C’est là que sa Troisième Symphonie voit le jour. Elle est son unique production cette année-là, autant dire que sa création est attendue avec impatience. Les salles se battent pour avoir l’honneur de la première audition. Le jour J, le 2 décembre 1883, à Vienne, le succès est tonitruant. Bientôt, l'œuvre est connue partout en Europe, et même de l’autre côté de l’Atlantique, aux États-Unis.
Le chef Hans Richter, qui dirige la symphonie le jour de sa création, va lui donner le surnom d’« éroïque », en raison de son caractère puissant, vif et enthousiaste, mais aussi, bien sûr, en écho à la Troisième Symphonie de Beethoven, l’« Héroïque ».
Écrite dans la tonalité de fa majeur, la Troisième Symphonie s’ouvre par trois accords solennels aux vents, fa-la bémol-fa, traduits par F.A.F. dans le système de notation allemande. Un écho aux initiales de la devise de Brahms : « Frei aber froh » (libre mais heureux). Ce motif reviendra dans l’ensemble du premier mouvement, de caractère élancé et passionné.
S’ensuit un Andante en do majeur, d’allure pastorale, tout en retenue, qui nous livre un dialogue empreint de poésie et de lyrisme, entre les vents et les cordes.
Vient ensuite le célèbre troisième mouvement, l’une des grandes réussites de Brahms. La mélodie, en ut mineur, est écrite sous la forme d’une valse, tout en grâce et poésie. Elle est énoncée au violoncelle, puis circule entre les différents instruments.
Le Finale, pour sa part, contraste avec les finales symphoniques habituels, brillants et triomphants. Si celui-ci a un côté conquérant, héroïque, qui peut nous rappeler le premier mouvement, il est obscurci par la tonalité de fa mineur et s’achève tout en douceur.
Pour Clara Schumann, grande amie de Brahms, « l’ensemble des mouvements semble n’être qu’un seul jet, un seul battement de cœur, chaque mouvement est un joyau ». À l’époque, le succès de la Troisième Symphonie est tel qu’elle éclipse complètement ses deux aînées. Brahms lui-même dira : « Ma symphonie est malheureusement trop célèbre. » Et pourtant, c’est peut-être aujourd’hui la moins jouée des quatre…