La série Les Clés du classique nous fait découvrir les grandes œuvres du répertoire musical.
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Les extraits de la Symphonie n° 3 « Héroïque » de Beethoven sont interprétés par le Rundfunk Sinfonieorchester Berlin, sous la direction de Marek Janowski. Ce concert a été enregistré à la Salle Pleyel le 13 mars 2011.
Retrouvez l'intégralité de ce concert sur Philharmonie à la demande.
C’est en 1802 que Beethoven ébauche sa Troisième Symphonie. Elle sera terminée deux ans plus tard, en mai 1804. En 1802, Beethoven est en plein drame personnel, dépassé par une surdité qui le fait de plus en plus souffrir. Réfugié à la campagne, à Heiligenstadt, il écrit une lettre à ses deux frères ; c’est le célèbre Testament de Heiligenstadt, jamais envoyé. Beethoven y fait part de son désarroi et de sa volonté de s’isoler pour garder sa maladie secrète. Finalement, le compositeur triomphe assez vite de cette crise ; c’est le début de sa période héroïque.
Dans un premier temps, la Symphonie n° 3, future Symphonie « Héroïque », est dédiée à Bonaparte, que Beethoven admire. Partisan des valeurs républicaines, il considère son héros comme le libérateur de l’Europe. En plus, les deux hommes sont nés à un an d’intervalle et Beethoven aime à penser que leurs destinées sont liées, comme le suggère le musicologue François-René Tranchefort.
C’est probablement le général Bernadotte, ambassadeur de France à Vienne, rencontré en 1798, qui aurait soufflé à Beethoven l’idée d’écrire une symphonie en l’honneur du jeune général. Certains disent qu’il pourrait aussi s'agir du violoniste Rudolf Kreutzer. Quoiqu’il en soit, Beethoven s’attèle à la tâche avec joie, et donne à sa symphonie le nom de Bonaparte.
À cette époque, Beethoven envisage même d’aller à Paris, peut-être dans l’idée de s’y installer. Il ne doute pas qu’apporter avec lui une partition en l’honneur de Bonaparte pourrait jouer en sa faveur… Mais en 1804, coup de théâtre : Napoléon est couronné empereur. Pour Beethoven, c’est une trahison suprême, une offense aux principes de la République !
Furieux, il raye sa dédicace et déclare à propos de Bonaparte : « Maintenant, il va n’obéir qu’à son ambition ! Il va s’élever plus haut que les autres, devenir un tyran ! » Ainsi, le compositeur choisit de plutôt dédier son œuvre à son mécène, le prince Lobkowitz et change le titre de la partition : « Symphonie héroïque, composée pour célébrer le souvenir d’un grand homme. »
Blessé, Beethoven décide aussi de remplacer le second mouvement, qui devait être une Marche triomphale, par une Marche funèbre, symbolisant le deuil de son héros. On raconte que, lorsqu’il dirigeait ce mouvement, le chef Hans von Bülow revêtait des gants noirs.
La Troisième Symphonie se démarque des deux précédentes, encore inspirées de Mozart ou de Haydn. Elle fait éclater les cadres de la symphonie classique. Par sa structure monumentale, sa durée, son style épique et dramatique, la Troisième Symphonie révolutionne le genre.
La Symphonie Héroïque se compose de quatre mouvements. Le premier, par son ampleur, ses proportions, ses choix harmoniques, apparaît déjà novateur. De même, le deuxième mouvement, la Marche funèbre, semble particulièrement long pour l’époque. La tension se relâche lors du Scherzo, sorte de course rapide et bondissante. Le Finale, quant à lui, reprend le thème du ballet Les Créatures de Prométhée, composé par Beethoven en 1800-1801, un thème utilisé aussi dans la septième des Douze Contredanses et dans les Variations pour piano op. 35. Ici, une série de variations succèdent au thème et le Finale se conclut par un presto triomphal.
Aussitôt après la création de la Troisième Symphonie, Beethoven se lance dans l’écriture de celle qui, encore plus dramatique, deviendra la Cinquième. Mais son écriture sera interrompue par la Quatrième, et elle ne sera achevée qu’en 1808.