Chanteur idéal, « Don Quichotte du son », selon son ami Jean-Michel Jarre, Christophe avait depuis 2010 envoûté le public de la Cité de la musique, de la Salle Pleyel puis de la Grande salle Pierre Boulez.
« Pour moi, le temps n’a pas de réalité », disait Christophe. Cela voulait dire qu’il avait apprivoisé l’éternité, et depuis longtemps ; depuis des succès qui avaient accompagné des générations de chagrins d’amour, d’étés solitaires, de nuits pensives et d’ivresses romanesques.
Cela voulait dire aussi qu’au bout d’une des carrières les plus accidentées de la chanson française, il laisse non seulement une longue guirlande de succès populaires, mais aussi l’alchimie d’une pop parfaite. Christophe vivait au carrefour de la variété française, du vieux blues américain, de la révolution d’Elvis, des harmoniques du sentimentalisme italien et de mille recherches sonore. « Don Quichotte du son », a dit Jean-Michel Jarre, fidèle ami, pour le résumer. Car Christophe pouvait passer une nuit entière sur deux accords d’un vieux synthétiseur analogique, partir en Égypte pour des violons ou faire installer un clavier à l’étage d’au-dessus pour que le son en arrive transformé dans son studio…
Une quête inlassable dans laquelle, en plus de cinquante ans de carrière, il a semé des 45 tours de diamant et des albums de légende. Et la Philharmonie garde précieusement le souvenir du concert de 2018, avec un Christophe à la fois fragile et impérial, voix de cristal dans une âme de roc, créateur soumettant ses créations au désir de les voir vaciller sur le fil d’un instant unique. Une manifestation de l’essence idéale de la musique : retrouver la splendeur de mélodies immortelles tout en recommençant perpétuellement l’aventure du frisson créatif.
Oui, Christophe était ce chanteur idéal, qui nous donnait l’illusion que le temps ne passe jamais, mais qui toujours réinventait sa vie entière.