Jordi Savall recrée les musiques du formidable itinéraire de l'écrivain arabe Ibn Battuta en 1325, avec une attention spéciale pour les répertoires arabes et occidentaux que le voyageur entendit dans les cours et les palais.
Ibn Battuta (littéralement « le fils du petit canard ») réalisa un voyage prodigieux de plus de 120 000 kilomètres et traversa la moitié du monde connu : parti du nord de l’Afrique, il visita l’Égypte, puis alla en direction de l’Arabie pour un pèlerinage dans les villes saintes de Médine et de la Mecque. De là, il se rendit en Palestine, en Syrie, en Irak et en Perse. Il traversa la mer Rouge pour visiter le Yémen, passa ensuite par le Soudan puis navigua sur l’océan Indien afin de connaître les colonies commerciales des Arabes sur la côte orientale africaine, ainsi qu’Oman et le golfe Persique. Il visita l’Anatolie, la grande ville de Constantinople – encore chrétienne – et par la suite, il s’aventura dans les froides steppes ukrainiennes pour finalement descendre au centre de l’Asie jusqu’en Afghanistan et au Pays de Sindh (le Pakistan actuel). Il s’établit en Inde durant sept ans puis visita les Maldives et Ceylan. De là, il se rendit au Bengale et en Indonésie pour finalement atteindre la Chine lointaine et mystérieuse. De retour au Maroc, il visita l’île de Sardaigne et ce qui restait d’Al-Andalus, pour ensuite traverser le désert du Sahara, arriver à Tombouctou et atteindre le coeur du légendaire Pays des Noirs (Bilad as-Sudan). Il visita l’ancien empire du Mali avant de revenir dans son pays natal en 1354 où il mourut quelques années plus tard, entre 1368 et 1377.
Alors qu’Ibn Battuta était revenu de ses voyages et s’était installé à Fès, le sultan Abu Inan du Maroc (de la dynastie des Mérinides – 1348-1358) lui demanda de mettre par écrit ses aventures et ses pérégrinations de par le monde, de décrire ses itinéraires parmi les diverses destinations et les divers peuples. Il mit à sa disposition un secrétaire, habitant de Grenade, Ibn Juzay al-Kalbi, qui recueillit ce que le maître lui dictait et qui organisa ce matériel pour en faire une chronique. La dictée terminée, le texte définitif fut publié un an plus tard, en 1355, sous le titre merveilleux de Précieux témoignage sur des pays exotiques et d’insolites voyages.
Manuel Forcano