Les mezzo-sopranos et les contraltos n’ont rien à envier aux sopranos. Séduits par leur timbre rond et grave, nombre de compositeurs leur ont offert certaines des plus belles pages d’opéra. Carmen et Dalila sont pour elles !
Comme son nom l’indique, le mezzo-soprano est une voix « medium », intermédiaire. Si sa tessiture est parfois aussi étendue que celle d’un soprano, son timbre est en revanche plus velouté.
Au XVIIIe siècle, le mezzo-soprano est pris en étau entre le soprano et le contralto. Ce n’est qu’au XIXe que ce type de voix émerge véritablement. Le courant romantique s’accompagne d’un déplacement de l’ensemble des voix vers l’aigu (Dictionnaire de la musique, Marc Vignal). Il ouvre ainsi une large brèche au mezzo-soprano, qui connaît son avènement avec les opéras de Verdi. Par ailleurs, la voix de mezzo-soprano peut chanter certains rôles destinés à un soprano ou à un contralto, ce qui étend encore son répertoire.
Le mezzo-soprano léger, entre page espiègle et héroïne rossinienne
La frontière est mince entre la voix de mezzo-soprano léger et celle de soprano. La différence repose essentiellement sur le timbre, plus rond chez la première. Même ses aigus se teintent d’une couleur plus sombre que celle d’un soprano dramatique.
Mais les mezzo-sopranos légers n’en ont pas moins une voix agile et éclatante, qui leur permet de se glisser dans la peau de personnages travestis, en particulier les jeunes pages malicieux. Le Chérubin des Noces de Figaro de Mozart en est un exemple emblématique.
Avec son tempérament juvénile, le mezzo-soprano léger se présente comme l’équivalent du soprano léger à qui reviennent les airs de soubrettes ou de jeunes filles naïves. La plupart du temps, ces rôles sont confiés à de jeunes cantatrices.
Comme pour les sopranos, on parle parfois de mezzo-soprano colorature, c’est-à-dire capable d’une grande virtuosité dans les aigus. Rossini et Donizetti ont beaucoup composé pour ce type de voix, qui est celui de Cecilia Bartoli.
Le mezzo-soprano dramatique, la forte tête
Les mezzo-sopranos dramatiques incarnent les femmes de caractère, à la personnalité tourmentée et complexe. Leur puissance vocale leur permet de lutter face à un orchestre symphonique. Quelle chanteuse n’a pas un jour rêvé de se muer en Carmen ou en Dalila le temps d’une représentation ?
Souvent rivale de l’héroïne, incarnée par un soprano, la mezzo est une séductrice, une traîtresse, une ennemie. Tour à tour, elle peut se glisser dans la peau de l’envoûtante Carmen de Bizet et de la redoutable Dalila de Saint-Saëns, dont Rita Gorr est l’une des interprètes les plus connues.
C’est à travers la voix de mezzo-soprano dramatique qu’éclate la fureur d’Amnéris et d’Eboli, les amoureuses jalouses et malheureuses d’Aïda et de Don Carlos de Verdi, deux rôles dans lesquels ont récemment excellé Anita Rachvelishvili (Amnéris) et Elina Garanča (Eboli).
Les mezzo-sopranos dramatiques n’interprètent cependant pas que des méchantes ! Parmi elles se glissent aussi des personnages comme la douce Charlotte de Werther (Massenet), incarnée à plusieurs reprises par Sophie Koch.
Le contralto, la femme mûre
Le contralto est la voix de femme la plus grave. Alain Perroux la définit comme une « voix féminine sépulcrale » (L’Opéra, mode d’emploi). Ses plus grands rôles datent du XIXe siècle, époque où disparaît peu à peu la voix de castrat, qu’il convient dès lors de remplacer. Malgré tout, le répertoire de contralto reste limité.
À l’opéra, les chanteuses qui possèdent cette voix revêtent les costumes de femmes mûres et sages, de mères, comme la déesse Erda dans Le Ring de Wagner, interprétée entre autres par Catherine Wyn-Rogers, ou de sorcières telles Ulrica dans Un bal masqué de Verdi et la Comtesse de La Dame de pique de Tchaïkovski.
Rares sont les compositeurs qui confient un rôle-titre à un contralto. Benjamin Britten a tenté le pari en pensant sa Lucrèce pour une voix de femme grave (Le Viol de Lucrèce). Le rôle est créé en 1946 par Kathleen Ferrier, l’un des plus grands contraltos du XXe siècle.