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Les Clés du classique #38 - Le Messie de Haendel

Publié le 31 octobre 2023 — par Charlotte Landru-Chandès

Le Messie est sans conteste l’oratorio le plus célèbre de Haendel. Pourtant, à l’origine, il n’a pas fait l’unanimité. Il faut dire que l’œuvre fait preuve d’originalité. Elle s’inscrit dans la tradition, sans pour autant lui être complètement fidèle.

La série Les Clés du classique vous fait découvrir les grandes œuvres du répertoire musical.

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Les extraits du Messie de Haendel sont interprétés par le chœur et l’orchestre The Sixteen, dirigé par Harry Christophers. Concert enregistré à la Cité de la musique le 23 septembre 2010.

Retrouvez l’intégralité de ce concert sur Philharmonie à la demande.


En 1741, époque de composition du Messie, Haendel ne rencontre plus le succès auprès du public. Il enchaîne les problèmes de santé, s’isole et perd le goût pour la création. Pourtant, le musicien n’a plus grand chose à prouver: il a déjà une statue à son effigie à Londres, de son vivant! C’est la lecture du livret écrit par son ami Charles Jennens, qui sort Haendel de sa solitude et compose Le Messie en 24 jours seulement.

Depuis quelques années, le public se détourne un peu de l’opéra pour lui préférer un autre genre, l’oratorio. Haendel va succomber à la mode et en composer une vingtaine. L’oratorio est une œuvre lyrique dramatique, écrite la plupart du temps autour d’un sujet religieux. Par sa forme, une ouverture, des récitatifs, des airs et des parties de chœurs, elle est assez proche de l’opéra. Au tournant des années 1730 et 1740, Haendel compose entre autres Saül, Samson, Israël en Égypte, et donc, Le Messie.

Haendel termine Le Messie en un temps record: en seulement trois semaines, entre le 22 août et le 14 septembre 1741, le compositeur crée son plus célèbre oratorio! Une prouesse quand on sait que l’œuvre dure environ deux heures et demie. Mais à vrai dire, ce n’est pas si surprenant, Haendel travaille de manière efficace et il est souvent rapide dans ses compositions.

L’œuvre a été composée dans le cadre d’une grande opération de charité, en faveur des détenus de plusieurs prisons, du Mercer’s Hospital de Stephen’s Street et de l’infirmerie de charité de l’Inns Quay. Peu avant la création, une annonce paraît dans les journaux. Pour faire de la place et accueillir le plus grand nombre de spectateurs possibles, on invite les dames à venir sans robes à paniers et les hommes sans épées! Plus il y aura de monde, plus la somme reversée aux trois organismes sera élevée. L’œuvre est créée à Dublin le 13 avril 1742, à la période de Pâques, dans la salle de musique de Fishamble Street.

Parmi les chanteurs, la contralto Susanna Maria Cibber, grande interprète de l’époque. Mais malgré ses qualités vocales et théâtrales, la chanteuse a aussi la réputation d’avoir des mœurs peu recommandables. Pourtant, le jour de la création du Messie, quand elle chante son air «He was despised» («Il fut méprisé et rejeté des hommes»), M. Delany, chancelier de l’église Saint-Patrick, s’adresse à elle: «Femme, pour cela, que tous tes péchés te soient pardonnés!»

Dans l’ensemble, le public dublinois est enthousiaste. Mais la création londonienne à Covent Garden n’est pas aussi favorable à Haendel. On reproche notamment au compositeur d’avoir choisi une salle de concert, un lieu jugé peu adapté au caractère sacré de l’œuvre.

Un peu plus tard, en 1750, Haendel offre sa partition au Foundling Hospital, un établissement charitable. Elle sera exécutée chaque année dans sa chapelle et rencontrera un grand succès. 

L’œuvre se démarque des oratorios allemands, comme ceux de Bach par exemple. Ici, Haendel ne met pas en valeur un épisode particulier de la vie du Christ, il retrace l’ensemble de sa mission. Le livret, signé Charles Jennens, se découpe en trois parties, inspirées de l’Ancien et du Nouveau Testament. La première se concentre essentiellement sur les prophéties autour de la venue du Christ et la Nativité. La deuxième partie raconte les épisodes de la Passion, de la Résurrection, de l’Ascension et de la Pentecôte. Elle se referme sur le passage le plus célèbre du Messie, l’«Hallelujah». La troisième partie, plus brève, s’interroge entre autres sur la mission rédemptrice du Christ et le triomphe de l’âme chrétienne sur la mort.

Le Messie devient bientôt l’un des piliers de la musique britannique. Après lui, de nombreux oratorios suivront comme Belshazzar, Judas Maccabée, Joshua, Theodora, ou encore Jephta.

Charlotte Landru-Chandès

Charlotte Landru-Chandès  collabore à France Musique, La Lettre du Musicien et Classica. Elle conçoit des podcasts pour l'Opéra national de Paris et la Philharmonie de Paris.

  • Un podcast de Charlotte Landru-Chandès
  • Réalisé par Taïssia Froidure
  • © Cité de la musique - Philharmonie de Paris