Si Jordi Savall, maître réputé de la viole française (Marais, Sainte-Colombe), ressuscita souvent l’orchestre du Roi-Soleil, il évoqua plus rarement celui de Louis le Bien-Aimé. Ce concert marque donc un renouvellement, une cure de jouvence opérée par le récent titulaire du Prix de la Culture catalane, ici à la tête, entre autres, des jeunes interprètes de son académie. Et sous les auspices d’un compositeur pourtant quasi-sexagénaire – puisque Rameau n’aborda pas l’opéra avant ses cinquante ans, en 1733, produisant avec une fougue juvénile, durant les trente ans qui lui restaient à vivre, près d’une trentaine d’ouvrages lyriques ! Extraites de deux de ses quatre tragédies et d’un opéra-ballet, les suites interprétées par Le Concert des Nations évoquent les principales sources d’inspiration du Dijonnais : l’exotisme, avec Les Indes galantes (1735), qui nous transportent de la Turquie à l’Amazonie en passant par le Pérou et la Perse ; le légendaire et la mythologie, avec l’avènement de Dardanus (1739), ancêtre des Troyens ; la magie, la lutte des éléments, le mysticisme, avec Zoroastre (1749), où le mage blanc du titre combat le sorcier Abramane. Monstre marin, trio des Songes, tempête, tremblement de terre, danse du calumet de la paix, ballet des Fleurs ou des Démons, vol des Zéphyrs ou des Génies : la profusion d’images convoquées par l’enchanteur Rameau outrepasse largement les artifices à la mode de la 3D !