Si le drame climatique et environnemental qui se joue pour les générations futures par la faute de celles qui les ont précédées a au moins une vertu, c’est de tous nous confronter à la nécessité de mieux comprendre les mécanismes de la nature et du vivant que nous avons déréglés. «Je souhaitais depuis longtemps proposer un projet à destination des enfants et de leurs parents alliant vulgarisation scientifique et sensibilisation musicale», explique Rachel Dale, responsable de l’action culturelle à l’Orchestre de Paris. «Le nom de Sabine Quindou s’est imposé comme une évidence.» Animatrice de l’émission Thalassa (et auparavant de C’est pas sorcier), Sabine excelle en effet dans l’art de partager la connaissance de façon ludique, en particulier avec les enfants. Autrice et metteuse en scène, elle écrit et joue également des spectacles musicaux pour orchestres. «Je suis depuis toujours passionnée par la danse, classique et contemporaine, mais je m’intéressais moins, à l’origine, aux œuvres musicales», confie-t-elle. «L’Orchestre national de Lyon a un jour fait appel à moi pour un projet pédagogique autour des Symphonies n°25 et 40 de Mozart. Révélation! Un monde sonore et émotionnel d’une telle richesse existait, et je ne le savais pas! Cette musique m’a happée pour ne plus me lâcher, et depuis ma soif d’écoute et de découverte est inextinguible. Quelle joie de pouvoir échanger avec les plus grands musiciens d’orchestre! Je suis la preuve vivante que la musique classique peut transformer une vie.»
Quand le thème de l’eau lui a été proposé, elle s’en est emparée en journaliste rompue à tous les défis: «Pour être efficace et percutant, il faut trouver le bon angle d’attaque! J’ai donc resserré le sujet sur le cycle aquatique, et plus particulièrement sur le rôle des océans dans l’apparition de la vie sur Terre, ce qui, vous en conviendrez, n’était déjà pas une mince affaire… Il y a deux façons de vulgariser la science: du point de vue de l’expert, comme le faisait Haroun Tazieff sur les volcans; ou encore du point de vue de celui qui découvre. Telle est l’approche de C’est pas sorcier, que je vais appliquer pour répondre aux questions que se posent les enfants: comment l’eau est-elle arrivée sur Terre? La vie est-elle née au fond des océans? D’où vient l’eau de la douche? Est-il vrai que l’eau est présente dans les roches?»
C’est avec la cheffe d’orchestre Lucie Leguay, qui dirigera l’Orchestre de Paris, que le programme musical est en train de se construire, à destination de trois publics: les scolaires en journée, les familles l’après-midi et tous les âges en soirée. La Mer de Debussy sera évidemment à l’honneur; mais aussi le quatrième mouvement intitulé Tonnerre-Orage dans la Symphonie n°6 «Pastorale» de Beethoven, ou encore un extrait des Fontaines de Rome du compositeur Ottorino Respighi. Nul doute que la puissance évocatrice de ces musiques donnera à Sabine Quindou une inspiration qu’il lui faudra dompter! «Je structure le spectacle comme un scénario, à partir du programme musical. Le public est là pour écouter de la musique, et elle est le point d’entrée pour un accès sensible au discours éclairant les enjeux liés aux océans. Tout au long des trois parties composant le spectacle, je vais devoir tricoter plusieurs récits: celui de la musique, de la parole, mais aussi des images!»
Sabine a choisi de travailler avec Damien Chevallier, biologiste au CNRS, spécialiste des tortues marines en Martinique. Pour les besoins de ses recherches, Damien avait notamment fixé sur la carapace du sympathique reptile une caméra, qui a généré un long plan séquence de vingt-quatre heures. «Les images sont totalement hypnotiques, vous voyez la tête de la tortue, ses nageoires, et plongez avec elle dans les eaux turquoise, c’est d’une poésie incroyable!», s’émerveille Sabine. Cette première tortue cinéaste méritait bien de devenir une protagoniste du spectacle: elle s’exprimera en voix off (peut-être par le truchement d’une interprète…), pour nous faire part de ses analyses et de son ressenti du monde sous-marin, à la suite du changement climatique ou des ravages de la pollution par les plastiques.
Enfin, l’illustratrice Léa Ennaji embarque elle aussi dans l’aventure, chargée de faciliter la compréhension des phénomènes physiques évoqués par Sabine et sa complice à nageoires. Ses aquarelles et ses aplats de couleur apporteront aux explications scientifiques l’éclairage de la simplicité et de l’évidence. «Mon plus grand défi?», s’interroge Sabine. «Que musique, film, dessins et paroles ne fassent qu’un pour donner encore plus de force au propos, que les enfants et les parents ressortent du spectacle en ayant à la fois découvert le répertoire musical classique, et compris quelques petites choses essentielles sur la façon dont fonctionne notre planète!»