Véritable fontaine de jouvence alimentée par plusieurs générations d’instrumentistes, l’OFJ ne connaît pas les outrages du temps. À 40 ans, il fait autorité dans le paysage de la formation au métier de musicien d’orchestre en France et a su s’ajuster aux métamorphoses d’une profession particulièrement évolutive durant ces dernières décennies.
L’Orchestre fête son anniversaire avec un livre et un concert à la Philharmonie de Paris, dimanche 11 décembre, en compagnie de la mezzo-soprano Adèle Charvet et de son directeur musical Michael Schønwandt.
Actuels ou anciens membres, tous vous le diront: l’OFJ n’est pas un orchestre comme les autres. En faire partie offre une expérience unique, riche et intense, qui marque profondément. Comme le révèle une étude menée par l’orchestre il y a cinq ans
DES MUSICIENS EN ADÉQUATION AVEC LE MONDE
À l’OFJ, on travaille certes un répertoire musical, mais l’on s’y dote aussi d’outils pertinents pour vivre sa vie de musicien d’orchestre. «Nous avons pour vocation de construire des consciences de musicienne et de musicien d’orchestre en adéquation avec notre monde d’aujourd’hui, précise Charlotte Ginot-Slacik, toute nouvelle directrice de l’orchestre, et de favoriser leur insertion professionnelle.» C’est une réussite si l’on considère les 2 280 musiciens comptabilisés en 2017, les effectifs toujours croissants et les retours d’enquête extrêmement positifs: 91% des ex-membres de l’OFJ embrassent une carrière de musicien professionnel, 59% sont en poste dans un orchestre professionnel.
Cette ambition pédagogique est à l’origine de la création de l’OFJ en 1982: le ministère de la Culture souhaite alors offrir aux musiciens en voie de professionnalisation la possibilité d’une formation de haut niveau. Les critères d’exigence artistique, de candidature et de financement majoritairement public restent, quarante ans plus tard, identiques. Tout aspirant capable d’aborder le répertoire symphonique, de nationalité française en situation d’étude en France ou à l’étranger, ou étudiant étranger inscrit en France peut postuler – en général, des élèves d’établissements supérieurs ou de troisième cycle de conservatoire, soit des jeunes âgés de seize à vingt-cinq ans. La composition de l’orchestre a quant à elle beaucoup évolué avec le développement, aux côtés des deux CNSMD, des pôles d’études supérieurs en France, qui offrent aujourd’hui près de la moitié de ses effectifs à l’OFJ et dont le niveau n’a cessé de s’élever.
UN ENSEIGNEMENT DE PROFESSIONNELS
Si l’OFJ est tant plébiscité, c’est qu’il propose une pratique collective complémentaire aux apprentissages individuels des conservatoires ainsi qu’une formation aux larges horizons. L’immersion en sessions de plusieurs semaines disséminées en quinconce du temps de formation offre des conditions de travail et de concert idéales pour approfondir un répertoire.
Autre paramètre important: l’enseignement est dispensé par une équipe pédagogique d’une vingtaine de professionnels, musiciens d’orchestre, chefs assistants, directeur musical, chefs et solistes invités –cette saison, Sarah Nemtanu et Adèle Charvet–, mais aussi intervenants spécialisés dans des domaines extra-musicaux comme la médiation. Michael Schønwandt, qui a pris la suite de Fabien Gabel en 2021, confirme que «ces rencontres avec les professionnels peuvent modifier une trajectoire de musicien». Et d’ajouter: «L’échange est réciproque, car tous ces jeunes m’apportent énormément. En concert, je suis bouleversé de sentir cette explosion d’émotion dès qu’ils jouent.»
CRÉÉR UNE RAISON D'ÊTRE ENSEMBLE
Or dans un orchestre dont les membres changent chaque année, la cohésion ou le répertoire ne naissent pas d’évidence. L’OFJ en a fait sa force. «Mon but, se réjouit le directeur musical, est de créer une raison d’être ensemble, de constituer un seul et unique organe, vivant, respirant d’un seul souffle.» Qui dit vivant dit mouvant, incessant questionnement et perpétuelle adaptation. «L’OFJ ne prétend pas apporter une réponse toute faite à ce que sera la musicienne ou le musicien de demain, explique Charlotte Ginot-Slacik, mais tend vers une mobilité intellectuelle constante pour avancer, évoluer, inventer. L’OFJ possède une identité en mouvement.»
C’est ainsi que l’orchestre a ouvert au fil des années des pistes nouvelles, proposant non plus une formation à l’orchestre mais aux orchestres. La mise en place de l’OFJ baroque il y a quelques années, aujourd’hui de l’OFJ classique avec le chef et violoniste Julien Chauvin permet de familiariser les étudiants à la pluralité des esthétiques. La relation aux publics et l’engagement sur un territoire –de 2017 à 2022, l’OFJ est en résidence dans la région Hauts-de-France– sont également sujets d’investigations et d’étude.
L’OFJ est enfin le premier orchestre national à avoir formalisé, par une charte éco-responsable signée en 2020, son engagement pionnier en faveur d’un moindre impact environnemental. Et il faut citer encore sa dimension européenne et les échanges favorisés par la Fédération européenne des orchestres nationaux de jeunes (EFNYO), dont l’OFJ est membre fondateur.
UN CONCERT ET UN LIVRE-ANNIVERSAIRE
Pour célébrer ses quarante ans, l’OFJ invite à la fête. Avec un concert tout de musique française, son répertoire emblématique. Berlioz, Chausson, Ravel et Lili Boulanger y sont convoqués à la Philharmonie de Paris aux côtés de Liesse, commandé pour l’occasion à la compositrice Suzanne Giraud. «Cette création répond à un dispositif particulier afin d’associer les anciens membres de l’OFJ à cet anniversaire, explique Michael Schønwandt qui dirigera le concert. Les effectifs actuels seront sur scène tandis que cinq groupes constitués d’ex-membres seront placés en-deça. Nous briserons ainsi le quatrième mur.»
Anciens et actuels musiciens de l’orchestre sont également réunis en images et en mots dans un livre qui sera disponible lors du concert, proposé dès maintenant à la vente en souscription