Barbara n’aura eu pour enfants que ceux qu’elle appelait ses « oiseaux », les admirateurs qui la suivaient de ville en ville au long de ses tournées. Mais l’enfance est un thème présent dans tout son répertoire, associé à la douceur, à la fragilité, à la beauté et à la vie.
À lire les titres des chansons de Barbara, on peut mesurer comme ce sujet était important pour elle : « Mon enfance », « L’enfant laboureur », « Cet enfant-là », « Les enfants de novembre ». En écoutant l’ensemble de ses « zinzins », on note que l’enfance revient de façon récurrente. Dès les premiers titres, on entend « les matinées enfantines » (« J’ai troqué »), puis « les rires d’enfant » (« Chapeau bas »). Sur l’album Barbara chante Barbara (1964), « Au bois de Saint-Amand » prend des airs de comptine, avec « nos quinze ans qui s’affolent », et « Sans bagages » évoque un petit garçon et une petite fille. Les enfants seront présents dans les plus grands succès de Barbara (« Göttingen », avec l’une des plus belles phrases de paix et d’amour qui ait jamais été chantée : « Les enfants, ce sont les mêmes à Paris et à Göttingen » ; « Ma plus belle histoire d’amour », où elle évoque ses « tendres amours de gosse » ; « Le soleil noir » - mais un enfant est mort » -, pour n’en citer que trois). Ils seront là aussi dans les titres moins connus, comme « Il automne », « La fleur, la source et l’amour », « Églantine », etc. Retenons particulièrement « Rémusat », chanson à la mémoire de sa mère, où les mots « on peut être une orpheline en n’étant plus une enfant » révèlent, inconsciemment sans doute, que Barbara, malgré les succès, les années, les amours, est restée pour toujours une enfant. Elle le répétera avec les mots de François Wertheimer, en se dépeignant en « Enfant laboureur ».
Comment ne pas citer aussi « Perlimpinpin » et son « enfant qui pleure » ; « Précy jardin », où elle rêve que le jardin de la maison devient « un square (…) pour tous les enfants de Précy » ; « Regarde », où elle convoque les enfants qui suivent l’homme à la rose « deux par deux, le cœur en amoureux ». Exception qui confirme la règle, il y a tout de même une « drôle de petite fille, très sautillante, bien énervée » dans la salle d’attente de l’aéroport de « Vol de nuit ».
C’est peut-être dans son dernier album qu’elle chantera avec la plus grande évidence son amour des enfants et son désir ardent de les protéger avec vigilance (et l’on sait à quel point il était important pour elle de « vigiler » et que nous « vigilions » à ses côtés). Certes, les mots de « Vivant poème » sont de Jean-Louis Aubert, mais bien sûr, Barbara aurait pu les signer. Cette chanson, une des toutes dernières, sonne comme un hymne et un peu comme un adieu, pour les trois générations qui l’avaient suivie depuis quarante ans, mais aussi comme un ultime espoir pour cette jeunesse qui avait apporté à Barbara une énergie inépuisable depuis Pantin.