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Les Clés du classique #40 - Un requiem allemand de Brahms

Publié le 30 novembre 2023 — par Charlotte Landru-Chandès

Brahms a 35 ans quand il crée son Requiem allemand, première de ses grandes œuvres chorales avec orchestre.

La série Les Clés du classique vous fait découvrir les grandes œuvres du répertoire musical.

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Les extraits du Requiem allemand de Brahms sont interprétés par l’Orchestre Révolutionnaire et Romantique et le Monterverdi Choir, dirigé par Sir John Eliot Gardiner. Concert enregistré à la Salle Pleyel le 18 novembre 2007.

Retrouvez l’intégralité du concert sur Philharmonie à la demande.


Longuement mûri, de la fin des années 1850 à 1866, le Requiem de Brahms porte l’empreinte d’une double perte, à commencer par celle de son mentor et grand ami Robert Schumann, disparu le 29 juillet 1856. C’est à ce moment-là, dans sa vingt-troisième année, que le jeune Brahms songe à composer une œuvre funèbre, qui demeure dans un premier temps à l’état de pensée. Schumann prévoyait d’ailleurs lui-même d’en écrire une sous forme de cantate.

À cette époque, Brahms peine encore à se lancer dans l’écriture d'œuvres symphoniques, trop intimidé par celles de ses prédécesseurs, Beethoven et Schumann. Sa Première Symphonie, dont les esquisses datent de 1854, ne verra le jour que vingt ans plus tard, en 1876 !

En 1865, Brahms subit une nouvelle perte, cette fois-ci plus intime, celle de sa mère. C’est probablement l’élément déclencheur de la composition du Requiem. Le compositeur décide alors de rassembler des feuillets d'œuvres abandonnées ou inachevées pour nourrir sa composition. Brahms compose l’essentiel de l’œuvre pendant l’année 1866. Le 17 août, quand il arrive à Lichtenthal, près de Baden-Baden, chez Clara Schumann, il a presque terminé. Retiré dans la nature, au calme, il peut paisiblement achever son Requiem.

C’est au concert, et non à la liturgie, que Brahms destine son Requiem, écrit en allemand plutôt qu’en latin. Ce n’est pas une œuvre solennelle, funèbre, mais plutôt intime et personnelle. Les textes du cinquième mouvement sont à ce titre révélateurs : « Comme un homme que console sa mère, ainsi je vous consolerai » – probablement un écho à la perte de sa mère. Brahms est un grand lecteur de la Bible, traduite par Luther. Il choisit des textes dont le propos est le plus large possible, assez différents de ceux qu’on a l’habitude d’entendre dans un requiem. Brahms ne nous propose pas une messe des morts à proprement parler, mais plutôt une méditation sur le sens de la vie. D’ailleurs, il avait pensé intituler son œuvre « Requiem humain » plutôt que « Requiem allemand ». 

L'œuvre, en sept mouvements, est partiellement créée le 1er décembre 1867 à Vienne. Le public de la Redoutensaal y découvre les trois premiers mouvements. Pour l’anecdote, un incident survient lors du troisième. Le timbalier, ayant mal lu les indications de Brahms, se met à jouer très fort et soutenu, alors que le passage est censé être piano ! L’erreur lui vaut quelques huées…

La création officielle de la première version du Requiem a lieu le 10 avril 1868, jour du Vendredi saint, à la cathédrale de Brême. L'œuvre est terminée depuis presque deux ans et n’a toujours pas été jouée en intégralité. Ce jour-là, Brahms dirige les chœurs et l’orchestre. Le public compte des invités de marque : Clara Schumann, le compositeur Max Bruch, le père de Brahms, venu spécialement de Hambourg avec de vieilles connaissances, et le grand violoniste Joseph Joachim, ami de Brahms. Cette fois-ci, c’est un succès total ! Après l’ajout de l’actuel cinquième mouvement, la version intégrale de l’œuvre est créée au Gewandhaus de Leipzig, le 18 février 1869. Pendant les dix années qui suivront, elle sera donnée des centaines de fois dans les pays germaniques.

Charlotte Landru-Chandès

Charlotte Landru-Chandès  collabore à France Musique, La Lettre du Musicien et Classica. Elle conçoit des podcasts pour l'Opéra national de Paris et la Philharmonie de Paris.

  • Un podcast de Charlotte Landru-Chandès
  • Réalisé par Taïssia Froidure
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