Une œuvre. Une date. Plus ou moins une coïncidence.
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Fantasia et la synesthésie
Au début des années 1880, le biométricien Francis Galton publiait dans la revue Nature un article scientifique qui s’arrêtait sur un cas de synesthésie. Le phénomène était alors connu: certaines personnes voient des couleurs à la place du noir des lettres d’imprimerie, pendant que d’autres en voient à l’écoute de certaines notes de musique. Mais là où beaucoup de scientifiques de l’époque voyaient dans ces hallucinations l’effet de drogues hallucinogènes, Francis Galton a fait partie des premiers à prendre le phénomène au sérieux et à constater que les enfants ont tendance à être plus facilement synesthètes que les adultes.
Au cours des décennies qui ont suivi, l’intérêt des chercheurs pour ces phénomènes s’est développé jusqu’en 1940. Cette année-là, le psychologue Heinz Werner en vient à suggérer que la synesthésie est si naturelle qu’elle pourrait concerner un enfant sur deux et que ce n’est qu’après l’âge de 10ans que la prévalence de la synesthésie commence à diminuer.
1940 est justement l’année où les studios Disney sortent le film Fantasia, qui commence par une animation en dessins animés abstraits qui mélangent ciel et figures géométriques, et la Toccata et Fugue de Bach, en référence directe aux expérimentations d’un cinéaste avant-gardiste allemand aujourd’hui bien connu des synesthètes: Oskar Fischinger. Ce dernier, quelques années plus tôt, s’était fait connaître des milieux du cinéma américain par des projections lumineuses de figures abstraites sur des musiques classiques.