Hommage au génie insatiable, et plein d’ironique spiritualité de Haydn, avec ce programme électrisant, s’achevant sur la sorcellerie des textures sonores de Ligeti, micropolyphonies dans lesquelles la musique semble à la fois naître et se désagréger.

Créée en 1792 dans l’effervescence des concerts londoniens, la Symphonie concertante (pour hautbois, basson, violon, violoncelle et orchestre) est une page d’admirable éloquence, dans laquelle Haydn, tout en intégrant un majestueux récitatif au violon, révèle toute sa tendresse pour le timbre du basson.

Plus notoire, la Symphonie « Il Distratto » (qui tire son titre d’une pièce française inspirée des Caractères de La Bruyère) conserve la théâtralité de la musique de scène : tour à tour endiablée, pompeuse ou martiale, elle fourmille d’effets de surprise, d’incongruités et de « chaos organisé », évoquant un personnage si étourdi qu’il doit, le jour de ses noces, « faire un nœud à son mouchoir pour se rappeler que c’est lui le marié » !

En contrepoint moderne, le Kammerkonzert (1970) de Ligeti envoûte par ses agglomérats de timbres et l’imbrication de ses structures rythmiques. Aucun soliste n’émerge vraiment de ce « concerto » paradoxal : c’est une virtuosité collective qui produit l’ondoyante magie de cette fascinante partition.