Entouré d’un orchestre de chambre, le Quatuor Debussy interprète trois concertos grossos de Peter Breiner composés à partir de chansons des Beatles, ainsi que des transcriptions originales pour quatuor à cordes seul.
Créé en 1990 et tendu vers l’inattendu, le Quatuor Debussy s’est hissé au premier plan de la scène musicale internationale au fil d’un parcours intensif, à rebours de tout esprit de chapelle. Lauréat de plusieurs prix prestigieux, dont une Victoire de la musique classique en 1996, il apparaît aujourd’hui comme l’un des quatuors à cordes les plus remarquables de notre temps. D’une sensibilité à fleur d’archet, les musiciens qui le constituent sont actuellement les suivants : Christophe Collette (premier violon), Emmanuel Bernard (deuxième violon), Vincent Deprecq (alto), Cédric Conchon (violoncelle).
Exigeant et audacieux, le Quatuor Debussy cultive une pratique de la musique classique résolument ouverte et atypique. Donnant des concerts à travers le monde, il compte en outre de nombreux enregistrements de référence à son actif, dont l’intégrale des quatuors de Chostakovitch et une version pour quatuor à cordes de l’illustrissime Requiem de Mozart. Désireux de varier les expériences et de toujours renouveler ses formes d’expression, il s’engage régulièrement dans des projets hybrides en dialogue avec les musiques actuelles, le jazz, le slam, le spectacle vivant ou encore les arts numériques.
Sa nouvelle aventure musicale l’amène à la rencontre d’un autre quatuor masculin – et pas le moindre : les Beatles. Faisant voler avec éclat la barrière censée séparer musique noble et musique populaire, cette création s’intitule Beatles Go baroque. Elle a vu le jour en janvier 2019 au Radiant-Bellevue, complexe culturel situé à Caluire-et-Cuire, près de Lyon. À l’origine du projet se trouve Victor Bosch, directeur et programmateur du Radiant-Bellevue collaborant de longue date avec le Quatuor Debussy. « Victor vient plutôt des musiques actuelles et de la variété, nous nous apprenons beaucoup mutuellement. Dans la perspective d’une création hors normes, comme il aime en proposer au Radiant-Bellevue, il m’avait suggéré de me plonger dans la musique des Beatles », raconte Christophe Collette, premier violon et directeur artistique du Quatuor Debussy.
À l’instar de nombreuses personnes nées dans les années 1970, Christophe Collette a été bercé dans son enfance par les chansons des Beatles, notamment celles qui figurent sur l’Album bleu et l’Album rouge, les deux fameuses (et fastueuses) compilations sorties en 1973. S’étant éloigné par la suite des p’tits gars de Liverpool, il y revient sur les conseils de Victor Bosch et redécouvre leur répertoire avec enthousiasme. « La musique des Beatles se distingue d’abord par un sens de la mélodie incroyable, ce qui donne à leurs chansons une portée vraiment universelle. Leur sens du rythme est également remarquable et prend des formes très variées d’une chanson à l’autre. Enfin, j’ai été particulièrement ébloui par la richesse du travail sur les harmonies de McCartney. »
Au cours de cette exploration exaltante de l’univers des Fab Four, Christophe Collette découvre Beatles Go Baroque de Peter Breiner. Sur cet album sorti en 1993, le compositeur et chef d’orchestre slovaque revisite vingt chansons des Beatles et les (ré)orchestre en mode baroque, dans le style de quatre compositeurs différents (Haendel, Vivaldi, Bach et Corelli), pour une formation de musique de chambre.
Un autre album traversant les styles et les époques va également faire forte impression sur Christophe Collette. Paru en 2014 et simplement intitulé The Beatles, il a été enregistré par le Wihan Quartet. Le quatuor à cordes tchèque y interprète un florilège de chansons des Beatles arrangées avec une inventive modernité par le compositeur Luboš Krticka.
Dans la configuration inédite présentée à la Philharmonie de Paris, Beatles Go Baroque donne à entendre trois des concertos de Peter Breiner, interprétés par le Quatuor Debussy avec un orchestre : le Concerto grosso n°1 (dans le style de Haendel), le Concerto grosso n°2 (dans le style de Vivaldi), le Concerto grosso n°4 (dans le style de Corelli). Entre les concertos s’intercalent six pièces pour quatuor seul : Eleanor Rigby, A Day in the Life, Yesterday, Can’t Buy Me Love, Black Bird et Lucy in the Sky with Diamonds.
À la fois ample et léger, tout en vivacité, l’ensemble confère une résonance neuve à l’indémodable – et inégalable – musique des Beatles. Cinquante ans après la séparation du groupe, leurs chansons n’ont rien perdu de leur flamboyance originelle, bien au contraire. Superbement transfigurées, elles apparaissent ici plus renversantes que jamais.