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Leif Ove Andsnes : poésie au sommet

Publié le 14 novembre 2023 — par Elsa Fottorino

— Leif Ove Andsnes - © Helge Hansen / Sony Music Entertainment

Âme de poète et puissance virtuose de sportif scandinave, le pianiste norvégien retrouve l’Orchestre de Paris et Klaus Mäkelä les 6 et 7 décembre 2023 pour célébrer Rachmaninoff.
— Leif Ove Andsnes - Rachmaninoff, Concertos pour piano n° 3 & 4 (extraits)

Imaginez une péninsule entourée de fjords à l’eau pure et baignée par la mer du Nord, un cirque montagneux et boisé, des maisons aux façades colorées, serrées les unes contre les autres comme pour se tenir chaud pendant les longs mois d’hiver. Il faut saisir la topographie de Bergen, où vit le pianiste entouré de sa femme et ses trois enfants et plus généralement des paysages qui l’entourent depuis l’enfance – il a grandi sur l’île de Karmøy, à l’ouest du pays – pour atteindre la quintessence de son jeu : clarté, couleurs, noblesse, puissance. Et un soupçon d’élégie. S’il s’illustre dans la musique nordique (ses enregistrements de Grieg, Nielsen ou Sibelius), sa discographie est également émaillée de grands cycles russes et germaniques. Ces dernières années, il s’est distingué à travers deux projets pharaoniques aux côtés du Mahler Chamber Orchestra : Mozart Momentum 1785/1786 et The Beethoven Journey, dans lequel il s’attelait aux cinq concertos de Beethoven.

Mais dès ses débuts, Rachmaninoff occupe l’un des rôles-titres de son répertoire et de sa discographie. « C’est l’un de mes grands amours », admet celui qui a signé une intégrale de ses concertos avec Antonio Pappano et le London Symphony Orchestra. La première fois qu’Andsnes se frotte au « Rach 3 », il est âgé de vingt-deux ans. Ce Troisième Concerto du compositeur est précédé d’une réputation redoutable, notamment pour sa virtuosité qui atteint des sommets dans la cadence du premier mouvement. L’œuvre réclame une maîtrise incandescente du clavier. « Il fait partie de moi, insiste le pianiste qui l’interprète depuis trente ans. Il est dans mon esprit, mes doigts. La première fois que je l’ai joué, j’ai travaillé pendant un an et demi, ce qui n’est pas dans mes habitudes ! Il y avait tellement de choses à penser… J’ai le souvenir d’être sorti du premier concert complètement épuisé, et dans une totale exaltation. »

— Beethoven - Concerto pour piano n° 3 par Leif Ove Andsnes (répétition)

Avec le temps son rapport à la virtuosité de cette partition a changé. « Je l’aborde avec la perspective d’un oiseau. Contrairement à mes débuts, je ne suis pas concentré sur chaque détail. Ma vision est plus large et je ressens moins les difficultés techniques. Ce chef-d’œuvre mêle la tradition romantique et l’effervescence du début du XXe siècle, reflet de cette ébullition artistique, de ce souffle nouveau. Il est souvent considéré comme un Everest car il y a énormément de notes et son interprétation est très physique pour le soliste. Mais le Concerto n° 2 est très difficile aussi : on entend tout ! Tandis que le Concerto n° 4 présente de véritables défis rythmiques. Chacun a ses difficultés propres. »

L’année 2023 marque les 150 ans de la naissance du compositeur, célébrés partout dans le monde. « Même si ses deuxième et troisième concertos sont populaires depuis longtemps, je suis heureux de voir Rachmaninoff enfin reconnu comme un grand compositeur. Il a longtemps été relégué au second rang, considéré comme très conservateur par rapport à Schönberg ou Stravinski. Les gens ont découvert à quel point sa musique n’était pas réductible à sa seule beauté mélodique, cette mélancolie poignante. Elle est aussi très architecturée et révèle son génie formel. » Après le Concerto n° 22 de Mozart en 2022, le Troisième de Rachmaninoff marquera les retrouvailles entre le soliste norvégien, Klaus Mäkelä et l’Orchestre de Paris. « Klaus va tout de suite dans le corps de la musique, des classiques viennois aux répertoires contemporains, souligne le pianiste. Et la Philharmonie de Paris est pour moi la meilleure salle contemporaine en Europe. C’est la combinaison parfaite entre une acoustique généreuse et une sonorité analytique. » Des retrouvailles qui s’annoncent comme un millésime.