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When Paths Meet - Entretien avec Sami Yusuf

Publié le 13 novembre 2023

— Sami Yusuf - © Clover Management Ltd

Fervent apôtre de l’universalisme, le chanteur et compositeur Sami Yusuf présente un concert de grande ampleur conçu spécialement pour la Philharmonie de Paris, au croisement de diverses traditions musicales et sacrées.
— Sami Yusuf - Karitas

When Paths Meet est un projet au long cours, sans durée déterminée, qui a été lancé officiellement à Amsterdam, en juin 2022, avec un concert dans le cadre du Holland Festival. En quoi consiste-t-il exactement ?

Sami Yusuf

Le projet tend à exprimer en sons comment les êtres humains se rencontrent, s’apprécient, s’aiment les uns les autres. Les musiques traditionnelles me passionnent par la manière dont elles traduisent les réalités les plus subtiles, au-delà des mots. When Paths Meet résulte de cette passion. Au tout début de la phase de gestation, je me suis posé la question suivante : de quelle façon communiquaient les personnes qui voyageaient sur la route de la soie il y a plus de mille ans ? Nous savons que les voyageurs découvraient le cœur des cultures qu’ils rencontraient à travers la musique et l’art parce que la musique révèle des aspects de l’expérience humaine sans les mots. La musique est directe, elle a le pouvoir de communiquer sans besoin de traduction. De mon point de vue, aucun texte ne peut rivaliser en puissance avec la musique. When Paths Meet procure au public l’expérience de langages musicaux profonds et nuancés venant de territoires aussi divers que le Pakistan, la Turquie, la France, l’Asie centrale, le Moyen-Orient, l’Europe, etc. C’est une célébration du génie de toutes ces traditions vivantes, qui doivent être considérées pour ce qu’elles sont et non pas pour ce qu’on voudrait qu’elles soient. Le dialogue musical qui a lieu pendant les concerts m’enthousiasme. Il est important de se rappeler que ce dialogue vient alimenter une conversation menée de très longue date. Les savoirs s’échangent à travers l’art depuis des milliers d’années. When Paths Meet s’attache ainsi à refondre des traditions musicales en un langage contemporain.

Comment cette initiative s’inscrit-elle dans votre recherche musicale ?

Sami Yusuf

Tout ce que j’ai pu faire auparavant a été influencé par la musique classique, entendue au sens large : pas seulement la musique classique occidentale, mais également d’autres grandes traditions musicales, d’Inde par exemple ou d’ailleurs. Depuis 10-15 ans, ma pratique s’est particulièrement articulée autour des musiques traditionnelles. Elles m’inspirent le plus grand respect car elles recèlent en leur cœur quelque chose de très profond, qui n’est pas de ce monde. Appelez cela comme vous voulez : le « secret », le « divin », le « suprême »… Je ne dirais pas que composer est facile, mais lorsque je m’y attelle j’ai le sentiment que la musique s’écoule à travers moi, vient naturellement. J’ai un rapport très intime, viscéral, avec les musiques traditionnelles, difficile à exprimer. Au fil de mes voyages à travers le monde, j’ai pu constater qu’il reste aujourd’hui peu d’instruments traditionnels. Jouer un rôle dans la préservation de ces musiques, et de leurs instruments, me semble essentiel. When Paths Meet m’y engage pleinement. Je trouve la source de mon inspiration dans le vaste océan qu’est la tradition et ce que je fais n’en constitue qu’une petite goutte.

Que représentent pour vous les deux soirées à la Philharmonie de Paris ? De quoi le programme musical va-t-il se composer ?

Sami Yusuf

Je suis très honoré et heureux de pouvoir présenter ma musique à la Philharmonie de Paris, qui m’apporte un soutien précieux sur ce projet et qui partage ma vision. De plus grande ampleur que le concert à Amsterdam, ces deux concerts parisiens représentent un défi supérieur à mes yeux. Ils vont rassembler un groupe très éclectique d’une cinquantaine d’interprètes remarquables comprenant mon ensemble – composé d’instrumentistes originaires de pays divers –, l’ensemble Scoring Orchestra de Paris, l’ensemble vocal Les Métaboles et cinq autres musiciens : Ronan Khalil (harpe), Ballaké Sissoko (kora), Antoine Morinière (guitare classique), Lorraine Llorca (orgue), Éléonore Fourniau (vielle à roue). Tant d’instruments différents, rares pour certains, constituent une palette très riche au service de ma conception musicale. Nous allons jouer quatre pièces récurrentes du projet ainsi que plusieurs compositions inédites, inspirées du patrimoine musical français et créées spécialement à cette occasion. 

Qu’avez-vous déjà appris en travaillant sur le projet ?

Sami Yusuf

Réunir tous ces instruments et toutes ces traditions musicales au sein d’un même concert n’est pas aisé, notamment en ce qui concerne l’accordage des instruments. En travaillant sur les nouvelles pièces qui vont être présentées à Paris, j’ai appris beaucoup de choses, par exemple relatives à l’orgue. When Paths Meet m’apparaît comme une expérience fantastique, parfois magique. Cette série de concerts m’enchante vraiment. Je vais sans doute en assurer la direction artistique pendant encore un an ou deux et j’espère qu’elle va se perpétuer à l’avenir sans moi, vivre de sa propre vie, avec à sa tête d’autres compositeurs ou compositrices.