Entre pleurs de joie et de peine, l’aveugle miraculé de Kawakami invite à une joyeuse sagesse de vie en chansons. Tandis que bientôt s’avance le fantôme, au salut incertain, d’un guerrier coupable d’avoir détruit une statue de Bouddha dans le nô Shigehira.

Le rire franc du kyōgen se teinte parfois de regrets : ayant recouvré la vue, l’aveugle de Kawakami s’inquiète de la perdre à nouveau mais s’en remet pour finir au destin avec bonne humeur. Autant de nuances exigeant de Manzo Nomura, Trésor National vivant, un art incomparable de tâtonner de sa canne sur la scène comme de s’exalter les yeux grands ouverts. Une harmonie que le nô Shigehira met en scène sur un plan spirituel : le fantôme d’un guerrier ayant incendié un temple et détruit une statue de bouddha dialogue avec un moine voyageur qui le guide vers le salut. Ce chef-d’œuvre du XVe siècle fut redécouvert par le maître de nô Masami Asakuni, convié en 2019 à la Philharmonie de Paris et décédé en 2021. Le choix de ce nô est un hommage de ses pairs.