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Théâtre nô et kyōgen, la grande tradition japonaise

Publié le 21 juin 2023 — par Véronique Brindeau

— Théâtre Nô & Kyôgen - © Yoshihiro Maejima

Chants pour les dieux, fantômes de guerriers et farces enjouées se succèdent sur la scène fidèlement reconstituée d’un authentique théâtre nô, tandis qu’un Salon de musique honore la poésie de la cithare koto.
— Théâtre Nô: Mystère, Mythe et Mouvement

Depuis le XIVe siècle, l’art du théâtre nô perpétue la grâce épurée de ses mouvements, la splendeur de ses costumes mais aussi la puissance d’un ensemble instrumental réunissant tambours et flûte, associé au lyrisme d’un chœur à l’unisson. Placés sous de fastes auspices par un «chant pour les dieux» initial, chacun des trois programmes proposés du 22 au 26 septembre se compose d’un drame, appelé nô, et d’une farce bouffonne kyōgen parodiant gaiement la gestuelle et la diction du nô. Comédie et tragédie alternent ainsi, comme il est d’usage dans ce répertoire au Japon, telles les deux faces d’une vie. Aux héros historiques ou légendaires, venus de l’au-delà jusqu’à nous le temps d’un nô, aux personnages marqués par un destin tragique abîmés dans la douleur et le regret, s’opposent ainsi des comédies de maîtres et valets, un monde d’ici-bas aux prises avec les cocasseries de la vie ordinaire.

Le programme des 22 et 25 septembre met d’abord en scène un des personnages typiques du kyōgen: un gendre inquiet de faire bonne figure devant son beau-père. Le nô Sumidagawa qui suit relate le parcours poignant d’une mère à la recherche de son fils, dont seul le spectre lui apparaîtra sur les rives de la Sumida. Les 23 et 26 septembre, un serviteur affublé d’un masque de démon afin de soutirer du saké à son maître laisse place à la danse d’adieu de la belle Shizuka et au spectaculaire combat d’un valeureux guerrier contre un spectre surgi des flots.

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Il arrive aussi que le rire bon enfant se teinte momentanément de regrets, comme dans le programme en matinée du 24 septembre: ayant recouvré la vue, l’aveugle de Kawakami s’inquiète de la perdre à nouveau mais s’en remet pour finir avec bonne humeur au destin. L’acteur Nomura Man, Trésor National vivant, excelle particulièrement dans ce type de rôle. Le nô Shigehira qui suit, du nom d’un guerrier historique dont le fantôme dialogue avec un moine en vue de son salut, est un chef-d’œuvre du XVe siècle redécouvert par le maître de nô Masami Asakuni, convié en 2019 à la Philharmonie de Paris et décédé en 2021. Le choix de ce nô est un hommage de ses pairs.

— Shigehira (théâtre nô) - © Yoshihiro Maejima

Le «nô de démon» du spectacle en famille le 23 septembre, Tsuchigumo, a tout d’un thème de manga: un héros doté d’un sabre magique combattant une redoutable araignée géante. Inspiré d’une légende du VIIIe siècle, c’est l’un des nôs plus spectaculaires du répertoire.

En clôture du week-end, un récital de koto met en lumière l’un des joyaux du Musée de la musique, une cithare de 1780 dont jouera Etsuko Chida. La profonde et pudique musicalité de cette interprète sert à la perfection le caractère intimiste et serein des suites vocales du XVIIIe siècle au programme de ce récital.