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120 Battements par minute : de la B.O. au concert

Publié le 04 avril 2019 — par Jean-Yves Leloup

— Entretien avec Arnaud Rebotini : 120 Battements par minute

Référence de la scène électro française, Arnaud Rebotini a composé la B. O. du film choc de Robin Camillo 120 Battements par minute, qu’il interprète aujourd’hui en live, accompagné du Don Van Club.

Révélé tardivement au grand public grâce au César obtenu en 2018 pour la bande originale du film 120 Battements par minute, Arnaud Rebotini possède déjà une solide carrière musicale, initiée dès le début des années 1990. Après une courte carrière au sein de Swamp, une formation death metal, le musicien, originaire de Nancy, débute sur la scène électronique en tant que disquaire au sein de l’équipe de Rough Trade, dans le quartier de Bastille à Paris, une boutique qui devient rapidement un lieu de rendez-vous et de découverte pour toute la génération des jeunes DJ de l’époque. Au cours de la seconde moitié des années 1990, il s’exerce et s’illustre dans de nombreux styles électros, de la jungle à la techno en passant par l’acid, sous une pléthore de pseudonymes et de duos comme Aleph, Avalanche, Krell, Sartrouville ou Zend Avesta.

Il se distingue toutefois à partir de 2000 avec Organique (réédité en 2019), un premier album qui lui permet d’explorer d’autres territoires encore, au croisement de la musique contemporaine, du rock et d’orchestrations plus cinématographiques, sur lesquelles viennent se poser les voix de Roya Arab, Mona Soyoc (de Kas Product) et même d’Alain Bashung. Au cours de la même décennie, Black Strobe, le duo qu’il compose avec le DJ Ivan Smagghe, connaît ses premiers succès sur les dancefloors, grâce à des titres comme « Italian Fireflies » (2004) et surtout « Me & Madonna » (2002), chanté par la DJ Jennifer Cardini, deux tubes qui flirtent avec la new wave et les références eighties.

C’est toutefois en 2008 que la carrière de l’artiste franchit un nouveau palier grâce à l’album Music Components, et son successeur Someone Gave Me Religion (2011). Music Components est l’un des disques à travers lesquels la techno, genre devenu moribond dans les années 2000, va connaître une première forme de résurrection. Ceci grâce à une idée simple : le retour aux synthétiseurs et boîtes à rythmes analogiques, instruments primitifs de la techno et de la musique électronique des années 1970 et 1980. Avec ces deux albums, Arnaud Rebotini devient l’auteur d’une techno lyrique et puissante, riche en harmoniques, aux timbres colorés, aux sonorités rondes et aux denses mélodies, et qui, malgré des effets et des sonorités qui évoquent de grandes formations des décennies passées, échappe avec élégance au piège de la citation et de la nostalgie.

Entre Organique et un tube underground comme « All You Need Is Techno », c’est justement cette capacité à surfer entre les styles, à s’accompagner de musiciens classiques comme de synthétiseurs vintage, qui séduit alors le cinéaste Robin Campillo, qui fait appel aux talent d’Arnaud Rebotini pour son deuxième film, Eastern Boys (2013). Sa bande originale, maîtrisée, annonce déjà 120 Battements par minute, deux créations qui mêlent électronique et organique, synthétiseurs, violons, flûte, violoncelle et clarinette.

Le succès suivra en 2017 avec la sortie du troisième film de Campillo, dans lequel le réalisateur évoque ses souvenirs de militant au sein de l’association Act Up, au cours d’une époque, les années 1990, marquée à la fois par le drame de l’épidémie de sida et l’énergie heureuse de la house music, qui triomphe sur les dancefloors.

Afin de transposer cette bande originale sur scène, Arnaud Rebotini a créé un ensemble orchestral de huit musiciens, baptisé le Don Van Club, pour lequel il a réécrit, réarrangé et enrichi les différents thèmes du film tout en restant fidèle à l’esprit original de la partition, qui mêlait les synthétiseurs caractéristiques de la house de l’époque (Juno 2, Korg M1, Jupiter 8, TR 909 ou SP1200 E-mu) à des mélodies de cordes et de vents.

Selon le musicien français, cette série de nouvelles orchestrations entend alterner des séquences calmes et minimalistes, par exemple à l’aide d’un duo pour harpe et violon, et des envolées dancefloor qui évoqueront l’atmosphère des clubs de l’époque, dans lesquels les militants d’Act Up venaient se ressourcer. Soutenus par la projection de quelques images et de séquences issues du film, Arnaud Rebotini et son Don Van Club transforment sur scène les trente minutes de composition originales du film en un concert de plus d’une heure et vingt minutes, dédié à cette décennie paradoxalement marquée par la tragédie et l’hédonisme. Enfin, depuis la sortie du film, Arnaud Rebotini, toujours aussi inspiré et productif, est déjà l’auteur de deux nouvelles bandes originales, Le Vent tourne (Bettina Oberli, 2018) et Curiosa (Lou Jeunet, 2019), sans oublier la récente musique du spectacle de danse contemporaine, Fix Me, composée pour le chorégraphe Alban Richard.