Daniil Trifonov s’est imposé sur le plan international après sa victoire au concours Tchaïkovski en 2011 – année où il remportait également le concours Arthur Rubinstein de Tel Aviv. Né en 1991 à Nijni Novgorod en Russie, il baigne dans un environnement privilégié : son père est compositeur et sa mère enseigne la musique. Il commence l’étude du piano à l’âge de 5 ans, donne son premier récital deux ans plus tard, puis étudie à l’Académie russe de musique Gnessine auprès de Tatiana Zelikman. En 2009, il part se perfectionner au Cleveland Institute of Music avec Sergei Babayan, dont il deviendra le disciple et avec qui il se produit désormais régulièrement à deux pianos.
Davantage encore qu’en studio d’enregistrement, c’est en public que Daniil Trifonov donne le meilleur de lui-même. Véritable bête de scène, toujours prêt à prendre tous les risques, son panache n’a d’égal que la tension qu’il confère aux œuvres qu’il aborde, telles celles de Rachmaninoff. De ce compositeur cher à son cœur, dont il a gravé l’œuvre pour piano et orchestre, il se mesure les 29 et 30 octobre – avec ses complices Yannick Nézet-Séguin et l’Orchestre de Philadelphie – au Concerto n° 4, sans doute le plus dense de tous, ainsi qu’à l’étincelante Rhapsodie sur un thème de Paganini.
Ses programmes de récital marquent par leur diversité de styles et d’époques. S’il affiche une prédilection pour les œuvres de l’ère romantique, telles celles de Liszt (Études d’exécution transcendante), il n’en néglige pas pour autant Rameau, Beethoven (telle l’immense sonate Hammerklavier), Ravel, Debussy (Images), Prokofiev, et même le secret créateur espagnol Federico Mompou. Sa soif de découverte de répertoires nouveaux en fait l’un des pianistes les plus curieux de notre temps et c’est avec le même appétit qu’il se jette sur des œuvres souvent délaissées par ses confrères (tel le Concerto de Scriabine) que sur un monument comme L’Art de la fugue de Bach. Ce goût du défi peut aussi l’amener à proposer un programme entièrement dévolu à des œuvres écrites après 1945 ou à jouer des concertos contemporains, comme celui de Mason Bates. Également compositeur, Daniil Trifonov est l’auteur notamment d’un concerto pour piano.
Chambriste remarquable, il aime à se produire avec le chanteur Matthias Goerne, le Quatuor Ebène ou encore Gautier Capuçon. Avec ce dernier, auquel le lie une grande complicité, il jouera le 10 février les sonates de Debussy, Rachmaninoff et Prokofiev.
Quant aux œuvres de Frédéric Chopin, elles figurent au cœur de son répertoire. Du musicien franco-polonais, auquel il ne cesse de revenir depuis son 3e Prix au concours de Varsovie en 2010 – édition où il remporte également le prix spécial de la meilleure exécution des mazurkas, récompense mettant en valeur généralement pianistes les plus subtils –, il interprétera les 24 et 25 janvier en compagnie de l’Orchestre de Paris et de Klaus Mäkelä le Concerto n° 1, le plus virtuose des deux, et l’une des œuvres pour piano et orchestre les plus redoutables qui soient. Amoureux du compositeur, il nous avait confié que l’écoute d’une interprétation historique du Scherzo n° 2 avait créé en lui des associations extra-musicales : « Je vois la lumière du soleil dans les mélodies, je sens l’air qui entoure la musique. Je suis très sensible à cette simplicité mozartienne, tout comme à la douleur de ces intonations. » Elle était signée Horowitz, l’un de ses pianistes favoris, auquel le rattache indéniablement l’électricité digitale et la grande attention portée au son.