Comme l’écrit Jacques Chailley, « la musique chorale ponctue les principaux temps et événements de la vie des hommes dont elle reflète craintes et espoirs » : il n’est pas étonnant que les compositeurs en aient intégré les forces vives dans leurs œuvres dès le Moyen Âge et tout au long des siècles qui ont suivi. La Philharmonie de Paris y consacre un week-end thématique qui permet d’en apprécier les multiples nuances.
L’association intime du chœur avec l’expérience de notre humanité que pointe Chailley fait de lui un véhicule de choix pour l’expression du sentiment religieux. Simon-Pierre Bestion, en ouverture du week-end, le montre bien en adoptant un programme transversal. La musique médiévale (et notamment la Messe de Notre-Dame de Guillaume de Machaut) y voisine avec des œuvres du XXe siècle composées par Ohana ainsi que par Stravinski, qui se disait désireux de revenir à l’« essence de la messe ».
À l’époque baroque et classique, l’oratorio, œuvre lyrique dont le sujet est généralement religieux, fait grand usage du chœur. Ainsi La Création de Haydn, donné par l’Orchestre de chambre de Paris et l’Ensemble Aedes sous la guidance de Masaaki Suzuki. « Je n’ai jamais été aussi dévot qu’à l’époque où je travaillais sur La Création ; je me jetais à genoux chaque jour pour implorer Dieu de me donner la force nécessaire pour finir mon œuvre », a confié Haydn à son propos. Au XIXe siècle, Verdi s’inscrit dans une histoire particulièrement riche en composant son propre Requiem, où l’on sent l’influence des scènes de théâtre chères à son cœur (le vendredi 4 octobre par l’Orchestre National de France et le Chœur de Radio France dirigés par Riccardo Muti), tandis que Beethoven, avec sa Neuvième Symphonie, exprime sa propre soif de communion et de spiritualité avec les mots de Schiller (le samedi 5 octobre, avec Raphaël Pichon aux manettes).
Les deux derniers concerts du week-end illustrent la ductilité du chœur, à la fois en termes de dimensions et de styles. Béatrice Malleret mène plusieurs formations vocales ainsi que l’Orchestre Pasdeloup dans un programme aux esthétiques variées (le samedi 5 octobre), des chœurs sans paroles de Ravel à la création contemporaine de Justina Repečkaitė, tandis que le trio Musica Humana, mené par Corinne Benizio, propose un décoiffant loto musical qui saute d’une époque à l’autre (le dimanche 6 octobre).