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Philippe Manoury : « Christophe Desjardins était une chance pour nous tous »

Publié le 21 janvier 2021 — par Philippe Manoury

— Christophe Desjardins et Philippe Manoury - © DR

Dans le cadre de l'hommage rendu à l'inoubliable altiste, le compositeur présente   Partita I, qui lui est dédiée. Elle constitue la première pièce d’un cycle consacré à la relation qu'entretiennent les instruments à cordes avec l'électronique.

 

Pour Christophe Desjardins


Christophe était une chance pour nous tous. Une chance pour celles et ceux qui ont croisé son chemin. Une chance plus grande encore pour qui a pu travailler à ses côtés. Pour nous, compositeurs, il était la personne idéale, toujours à l’écoute, offrant le maximum de ses possibilités, qui étaient immenses. C’était un musicien d’une extrême finesse et d’une grande culture. Il mettait toute son intelligence au service de la musique. Lorsqu’il jouait, on pouvait lire la concentration sur son visage. La précision avec laquelle il phrasait et la sensibilité qui l’animait dans la recherche de la plus belle sonorité possible ont été de grandes leçons pour moi. Il faisait partie de ces musiciens à qui il n’est pas nécessaire de trop expliquer car sa compréhension, tant intellectuelle qu’intuitive, était immédiate.

J’ai eu un immense plaisir à composer cette Partita pour lui, et c’était non seulement une joie mais un privilège de l’entendre sous ses doigts. Je l’ai, pour ainsi dire, taillée à sa mesure, car je savais de quelle trempe était ce musicien. Nous l’avons donnée dans de nombreuses villes d’Europe, puis dans une tournée aux États-Unis et au Mexique et, dans ce contexte, j’ai pu apprécier une autre facette de sa personnalité. Christophe était un homme très gai et aussi très drôle. Ses jeux de mots fusaient dans tous les sens et, dès qu’il arrivait, je savais que la contrepèterie n’allait pas tarder ! Il y a quelques mois, je lui avais envoyé une pièce pour alto solo que j’avais composée en 2017. Il ne m’a pas répondu. Je me promettais de l’appeler pour lui demander ce qu’il en pensait. J’ai compris la raison de ce silence, inhabituel chez lui, lorsque mes amis Françoise et Jean-Philippe Billarant m’ont appris la triste nouvelle.

Sa discrétion était un des nombreux traits de son élégance. Christophe laisse un grand vide en nous, mais il nous a tant donné que son souvenir va continuer longtemps à nous habiter.

18 février 2020