Animal-roi de la forêt, le cerf devient dans l'œuvre de Gloria Friedmann un Envoyé spécial de la nature qui, du haut de son socle, défie le visiteur.
La tête levée, l'encolure tendue et le museau ouvert font croire qu'on va entendre le brame du cerf de Gloria Friedmann. Il devient l'Envoyé spécial de la planète qui, juché sur un amas de journaux avec leurs nouvelles à court terme, si neuves qu'elles n'ont plus cours le lendemain, lance le cri d'alarme de la destruction à long terme de la vie sur Terre.
Le brame, à la tonalité si gutturale qu'il sème l'effroi chez les humains, est un appel aux biches et à la procréation pour la survie de la race, entendu dans ce contexte comme un cri de détresse face à l'extinction des espèces animales. Les journaux et leurs monceau de mots aux informations si éphémères sont d'énormes consommateurs de bois qui sert à faire le papier. Ils représentent l'arbre qui cache la forêt nécessaire à la survie des cervidés. Comme des appels à la procréation, des chromos de cerf bramant décoraient autrefois souvent les chambres à coucher en Allemagne.
Jean-Hubert Martin
Musicanimale. Le grand bestiaire sonore, Marie-Pauline Martin & Jean-Hubert Martin (dir.), Gallimard | Musée de la musique-Philharmonie de Paris, Paris, 2022